Ibrahima Fofana, le leader de l’USTG, l’Union syndicale des travailleurs de Guinée, a trouvé la mort vendredi 16 avril 2010 dans un accident de voiture alors qu’il rentrait de la ville de Fria où il participait aux négociations entre les travailleurs et la direction de l’entreprise Russal qui gérait l’usine d’alumine de la ville.
Une autre syndicaliste, Magbé Bangoura, secrétaire générale de la Confédération guinéenne des syndicats libres, a, elle aussi, trouvé la mort dans la même circonstance. Ibrahima Fofana était devenu depuis 2007 le leader emblématique du mouvement social guinéen, l’homme qui avait secoué le régime du feu Général Lansana Conté.
Les Guinéens retiennent d’Ibrahima Fofana l’image d’un homme courageux, engagé et déterminé pour conquérir ce qu’il vise. Il s’illustre lors des grandes grèves de janvier et février 2007 à la tête de l’Union syndicale des travailleurs de Guinée en compagnie de Rabiatou Serah Diallo, chef de file de l’autre grande centrale syndicale, la CNTG (Confédération nationale des travailleurs de Guinée).
A l’époque, le pays est à bout. Le régime de Lansana Conté dépérit et l’économie est exsangue. Dans une société où même l’opposition politique ne peut plus jouer son rôle, ce sont les syndicats qui prennent le relais.
Ibrahima Fofana fait descendre les travailleurs dans la rue. Alors que la répression s’abat sur les manifestants, Ibrahima Fofana ne recule pas, même quand d’autres veulent négocier. Au contraire, il politise ses revendications et finit par faire céder le président Lansana Conté, contraint d’accepter un gouvernement de large consensus dont Lansana Kouyaté a été nommé premier ministre.
Ibrahima Fofana fut le premier à avoir fait céder Lansana Conté en vingt années de pouvoir. Mais cet homme au physique massif et au sourire jovial n’en tire aucune gloire. Il profite de sa notoriété et de son influence nouvelle pour structurer le mouvement social.
Après la mort de Lansana Conté, il croit comme beaucoup à la transition annoncée par Dadis Camara et rejoint le Conseil économique et social.
Un excès de vitesse serait à l’origine de l’accident meurtrier.
« Le véhicule à bord duquel ils avaient pris place roulait à vive allure et le chauffeur a perdu son contrôle en abordant un virage dangereux. Il a percuté un arbre. Trois des cinq occupants du véhicule ont trouvé la mort sur place », rappelle ce syndicaliste que nous avons joint au téléphone.
Au moins deux autres personnes ont été grièvement blessées dans l’accident, dont une se trouvait dans un état jugé « préoccupant. Elles ont été admises à l’hôpital Pénichey, à Fria», se souvient-il .
Depuis sa mort il y a 8 ans, le mouvement syndical guinéen est devenu orphelin. Il est actuellement dirigé par des opportunistes qui pensent plutôt à leur intérêt que celui des travailleurs. L’unique syndicaliste qui s’est héroïquement illustré dans ces derniers temps est Aboubacar Soumah, secrétaire général du Syndicat Libre des Enseignants de Guinée (SLEG) qui a secoué le pouvoir d’Alpha Condé jusqu’à la rentrée du palais lors de la récente grève des enseignants qui a paralysé tout le pays.
Kadiatou Kamara