Je suis à la fois choqué et révolté de lire le communiqué du gouvernement guinéen condamnant les propos de Ibrahima Chérif Bah et Ousmane Gaoual Diallo qui dénoncent, à juste raison, l’exclusion de plus de 900 cadres Peuls de l’administration depuis l’arrivée de Alpha Condé au pouvoir en 2010. Je ne savais pas que notre gouvernement avait de la voix et la plume pour dénoncer l’injustice, la discrimination et les déclarations qui portent atteinte à l’Unité Nationale et à la cohésion sociale.
Pourtant, Alpha Condé est le premier sur ce registre et ne cache même pas sa phobie à l’encontre des Peuls. Les douloureux événements des campagnes présidentielles de 2010 et 2015 à Kouroussa, kankan, Siguiri et Banankoro, l’histoire de l’eau empoisonnée à Conakry, les exactions du colonel Issa Camara à Mamou, Dalaba, Pita et, récemment, Mali, ajoutés aux termes injurieux: « les Peuls sont des poux, des punaises et des tortues dont ils faut chauffer le derrière « , ou encore » la Guinée appartient aux Soussous, Malinkés et Forestiers « , en sont l’illustration.
Où était le gouvernement quand Alpha Condé a créé la politique du » Manden Djallon » pour opposer les fils du Fouta Djallon ?
Le ridicule ne tue vraiment pas, sinon le gouvernement aurait eu un peu de scrupules et avoir de la retenue dans sa condamnation de Ibrahima Chérif Bah et Ousmane Gaoual Diallo, tant il est vrai que les cadres Peuls ont été renvoyés, par centaines, de leurs postes et remplacés par des militants du RPG, pour la plupart, Malinkés. A telle enseigne que le Malinké est devenu la langue officielle dans presque tous les services de l’Etat dont le personnel de certains, est essentiellement composée de cadres portant le même nom.
Kouroussa, Kankan et Siguiri détiennent, à eux seuls, au moins les 60 pour cent de l’administration civile et militaire. Sans compter que la plupart des régies financières de l’Etat, les départements régaliens, ainsi que nos ambassades, sont également tenus par les Malinkés.
Et, les quelques rares cadres Peuls postés, souvent selon la répartition suivante: Malinkés- Soussous-Forestiers et Peuls, en dernier ressort, sont victimes de harcèlement pour répondre présents aux manifestations du RPG Arc-En-Ciel au risque de se voir remplacer. C’est le triste cas, à la Caisse de Sécurité Sociale, dirigée d’une main de fer par Malick Sankhon.
Pire encore. Alpha Condé, dès sa prise de pouvoir, a annoncé les couleurs en faisant la répartition suivante: Primature et Ligue Islamique: Basse Côte; Présidence de l’Assemblée nationale: la Guinée Forestière; la Cour des Comptes, la Cour Constitutionnelle et l’Exécutif: la Haute Guinée. Le Fouta se contente du strapontin du Conseil Economique et Social. C’est du jamais vu en Guinée.
Lorsqu’on a « africanisé » le poste de Directeur Général de la CBG, et après le brillant et rigoureux Kémoko Touré, Bachir Diallo avait les faveurs à cause de sa connaissance parfaite de la boîte. Le gouvernement guinéen a préféré arbitrairement Namory Condé aux dépens du brillant et talentueux Bachir Diallo.
A la fin du contrat de ce dernier, récemment, Bachir Diallo, Ablo Diallo, Alpha Tata Baldé, ou encore Tahirou Diallo, avaient tous les capacités indéniables de diriger la CBG. Mais, ils sont Peuls. On a trouvé la formule astucieuse de renoncer à un choix interne pour recruter un Malinké du nom de Souleymane Traoré qui était, jusque là, à la Compagnie Pétrolière » Total » en Sierra Léone.
Et sur tous ces actes quotidiens qui ressemblent à une épuration ethnique, le gouvernement ne pipe mot. De même, les 80 morts Peuls lors des manifestations politiques qui reposent au cimetière de Bambéto, ainsi que les handicapés à vie et les victimes des pillages ne constituent pas une priorité du gouvernement qui protège d’ailleurs les commanditaires et les exécutants de ces sales besognes.
Que dit le gouvernement lorsqu’Alpha Condé a divisé les fils de la Guinée par des propos désobligeants et des actes comme ceux des rencontres avec des représentants de communautés, parfois au siège du RPG ?
Des faux représentants comme ceux qu’il a reçus dernièrement et qui prétendaient être ceux du Fouta-Djallon. La vérité est rétablie. Ce sont des indignes affamés, ramassés à Conakry pour lesquels on est allé acheter des bonnets » Pouto » au marché Madina.
A l’attention de Alpha Condé, ses sbires et son gouvernement d’irresponsables: le Fouta Djallon n’est pas une jungle, mais une terre d’Islam, de tolérance, d’hospitalité et de paix dont le premier responsable est le Khalife général, Elhadj Bano Bah de Pita. Et, partout dans la région, règne un climat de meilleur vivre ensemble, fortifié par le prestige et le respect dû aux grandes familles maraboutiques. Où était le gouvernement quand Alpha condé a saboté l’inauguration de la Mosquée de Fatako et fait jeter du Gaz Lacrymogène à celle de Timbo?
Je demande au gouvernement de suivre le journal télévisé de la RTG, de noter tous les noms et me dire combien de cadres Peuls il a dénombré, et surtout, combien de Malinkés, de Soussous et de Forestiers.
Aujourd’hui, Alpha Condé exporte sa haine contre les peuls. Tenez ! Des informations de première main me sont parvenues quand j’étais malade, puis convalescent, en juin dernier en France.
Selon ses sources, Alpha Condé, après la correctionnelle au bois vert diplomatique qu’il a prise de la part du ministre des affaires étrangères du Sénégal au sommet de l’union Africaine, à Addis Abeba, notre « koro fausses promesses » aurait distribué un rapport aux sommets du G7 en Italie et G20 en Allemagne pour présenter le Fouta Djallon comme un terreau du terrorisme dont l’UFDG serait le vecteur principal.
Sa farouche opposition au président Macky Sall dont il aurait financé la campagne des adversaires politiques des législatives de dimanche, s’inscrirait aussi dans la même logique anti-peule après que l’enfant de Fatick lui ait ravi la vedette en Guinée Bissau et en Gambie.
Mais, ce qu’Alpha Condé ne pardonne pas à Macky Sall, c’est son leadership dominant, non seulement en Afrique, mais surtout à l’étranger, en France, notamment, où il fut le premier président africain à être reçu par le tout nouveau président Emmanuel Macron.
Pour finir, je souhaite vivement que le gouvernement ne se limite pas aux mots. Mais qu’il passe aux actes en portant plainte contre Ibrahima Ohérif bah et Ousmane Gaoual Diallo.
Ce sera une très bonne occasion de faire un autre grand déballage sur la catastrophique gouvernance d’Alpha Condé dont l’expérience dans la gestion d’un Etat et la consolidation d’une nation s’est plus médiocre que jamais.
Amadou Diouldé Diallo, journaliste et historien