En marge de la journée internationale de la femme, célébrée ce 08 mars, notre rédaction est allée à la rencontre d’une femme entrepreneure, qui évolue dans le domaine agricole.
Avec Virginie Touré épouse de BAGLION DE LA DUFFERIE, nous avons abordé plusieurs sujets qui assaillent le secteur agricole en Guinée ainsi que les opportunités qui s’offrent dans ce secteur porteur de l’économie.
Lisez….

Kababachir.com : Vous êtes une femme d’affaire qui évolue dans le secteur agricole. Dites-nous pourquoi le choix de ce secteur et comment se porte votre entreprise aujourd’hui ?


Virginie Touré :
 Je suis venue dans l’agriculture par les gènes. Mon père était un agriculteur depuis les années 50 il a fait le maraichage, il a acquit le domaine de Dondolikhoure , dès 1962 à Sanoyah. C’est vrai qu’à la base je n’étais pas très disposée parce que j’ai fait une formation de communicante mais je crois que l’amour de la terre était plus forte et quand je suis revenue dans le domaine familial l’envie ma prise comme ça de revenir à la terre. Après je me suis mieux préparée par le biais d’une formation pour me lancer définitivement dedans.
Pour ce qui est de mon entreprise, la ferme de Dondolikhoure , on est en pleine restructuration, parce qu’il y a un an j’avais arrêtée la production et depuis un moment, je viens de relancer, cava, ça reprend.

Vous faites la culture maraîchère j’imagine
On a une bananeraie avec 1500 plants de bananiers et nous avons des fruits, nous faisons par exemple la papaye, du maraichage et puis des feuilles…….

Vous avez assisté récemment à des rencontres avec des professionnels du secteur, notamment au Ghana, puis en Côté d’Ivoire. De quoi il avait été question ?
En fait au Ghana, c’était la 5ème conférence de l’agriculture biologique en Afrique de l’Ouest. Ce qui a été important dans cette conférence, ce que c’est la première fois que la Guinée participait. Elle réunissait autour d’une table tous les acteurs de la bio ouest Africaine. J’ai pu représenter la Guinée, grâce à cette participation, la Guinée pourra bénéficier dans les mois à venir, des aides de l’Organisation mondiale l’Agriculture Biologique.
Beaucoup de points ont été abordés, mais moi ce qui me concerne l’IFOAM puissent venir mettre en place le SPG, qui est le système de participation Garantie. C’est-à-dire, c’est un système qui permet de pré-certifier les petits producteurs locaux en agriculture biologie pour qu’on puisse développer l’agriculture biologique locale, pour le marché local. Que les gens puissent manger de façon saine, mais localement, ce n’est pas pour l’export, mais pour la consommation locale. Donc ça c’est qui était important pour ma participation à Accra.
Quant à Abidjan, c’était le salon international de l’agriculture et des ressources animales le SARA, je suis allée représenter mes jus ‘’la paysanne gourmande’’ pour montrer les jus naturels que nous produisons et c’était très intéressant parce que la Guinée a pu mettre de la ferme biologique, la Guinée a présenté ses produits. On a mis en avant l’ananas et on a pu faire des échanges avec certains producteurs ivoiriens et quelques acheteurs. Donc je pense que les relations vont pouvoir se concrétiser bientôt.
Il y a également EXPO 2020 à Dubai qui se pointe à l’horizon, je ne sais pas si vous comptez prendre part à cette exposition de grande envergure ?
Malheureusement, il y a une commission qui a décidé au niveau du ministère des investissements qui a jugé pas utiles que mes produits soient présents.

L’avenir de la profession semble plutôt sombre en ce sens que certains exploitants agricoles pratiquent l’activité encore de manière rudimentaire et la rentabilité reste faible. Quel est votre avis ?

Oui, c’est vrai. Aujourd’hui il y a même il y a un facteur très dangereux qui prévaut en Guinée. C’est cette nouvelle technique de brûler les terres. Je ne comprend pas comment on peut brûler les terres d’un producteur après tous les efforts, tout l’argent que nous mettons pour pouvoir subvenir aux besoins de nos familles et aussi nourrir la population que des individus s’amusent comme ça à brûler des hectares d’anacardes un peu partout des cultures vivrières, des ananas,…. Des personnes mal saines, elles sont très peu mais je pense qu’il faut que l’Etat joue son rôle. Il faut que le ministère de la Justice puisse réagir parce que ces personnes là ne sont pas inquiétées. Tu perds comme ça des millions voir des milliards. Qui rembourse ? On n’a pas d’assurance, les banques déjà ne nous accompagnent presque pas. Et en plus, on brûle et ça reste impuni. L’Etat qu’est ce que l’Etat propose pour toutes ces personnes qui ont perdu de l’argent. Donc ça c’est un vrai problème.
En ce qui concerne la rentabilité, c’est sûr que si on ne modernise pas notre agriculture, ça sera faible. Il faudrait que l’Etat nous aide à travers du matériel, mais il faut aussi qu’on puisse créer beaucoup plus de coopératives et on achète aussi du matériel agricole pour pouvoir travailler, parce que la plupart des intervenants du secteur ne peuvent pas acheter une herz ou une machine dés herbeuse à des dizaines voire des centaines de millions de francs guinéens. Il faut qu’on se mette ensemble comme en Europe et qu’on puisse travailler de façon intelligente.


Vous qui avez aujourd’hui une expertise dans ce secteur, en quoi consiste l’agriculture biologique et quelle est sa particularité ?

L’agriculture biologique est une agriculture qui est respectueuse de l’environnement, de la biodiversité, qui exclut toute utilisation de l’intrant chimique et qui met en son sein aussi le bien être animal. C’est cette agriculture qui va développer la fertilité de sol de façon naturelle, à travers la rotation des cultures avec le désherbage, elle peut être mécanique ou manuelle. C’est cette agriculture qui nourrit le sol de façon saine.
Quelqu’un qui fait du gombo sur une superficie de 100 m2 par exemple. Quand il finit, au lieu de faire de gombo, tu peux utiliser de feuille, mais tu laisse la terre se reposer et 40 jours après, tu refais après du gombo. Mais si vous faites la même culture tout le temps, il y a un problème. Donc il faudrait changer de culture Il y a des cultures quand vous les faites ensemble, ça fait une lutte biologique.
Que signifie les produits certifiés issus de l’agriculture biologique ?
Un produit certifié de l’agriculture biologique c’est un produit qui est reconnu par un organisme de certification accrédité par l’Union Européenne. Pour reconnaitre un produit certifié, vous allez avoir un logo avec les différents pays de l’Union Européenne.

Avez-vous des conseils pour des jeunes qui veulent se lancer dans cette activité ?

Moi je dirai aux jeunes qui veulent faire l’agriculture de bien réfléchir, parce qu’on ne fait pas l’agriculture pour le faire. C’est un métier, il faut l’aimer parce que c’est dur, ça ses contraintes, dont les contraintes environnementales, comme les feux de brousses par exemple. Ça peut aussi être des inondations. Il faut également être formé pour voir quel genre de culture il faut savoir pourquoi elle est rentable, parce qu’il ne faut pas faire comme tout le monde et puis après, à la fin du mois, il n’ya rien. Donc il faut faire des cultures rentables et chercher à être curieux, s’améliorer chercher à comprendre comment les autres font pour réussir. Il faut penser aussi côté financier parce que c’est une agriculture moderne qui demande des moyens. Et moi je serai disponible pour toutes les personnes qui voudront se faire certifier, soit au niveau de la formation ou mettre en place un système de contrôle interne, de la certification, les produits ou sur le marché local.

A l’occasion de la journée internationale de la femme, ce 08 mars, avez-vous un message particulier à l’endroit de la junte féminine ?

Je voudrais profiter de votre micro pour saluer toutes les braves femmes de la Guinée, parce que c’est notre mois, c’est le mois où nous brandissons tous nos droits, donc aujourd’hui je suis contente que tout le monde prenne conscience que la femme fait tout ce que l’homme fait.
J’invite les femmes et les hommes à œuvrer afin qu’on parvienne à trouver la solution à la problématique des mutilations génitales, mais aussi des mariages précoces. En ce qui concerne la violence faite aux femmes, il faut que ça s’arrête.

Je voudrais également inviter les femmes à s’investir davantage dans l’entreprenariat.
Il faut encourager l’entreprenariat féminin qui occupe aujourd’hui une place de choix dans l’économie nationale. Aujourd’hui, la contribution des femmes dans les ménages est nécessaire, parce qu’il faut que la femme aussi soit à mesure de payer la facture, c’est pourquoi on parle de l’égalité homme-femme. Mais pour cela, nous avons aussi besoin d’être accompagné par les hommes et l’Etat.

Mme Virginie Touré, merci

C’est à moi de vous remercier.

Réalisé par Kaba bacchir