Qu’un simple citoyen se dresse contre le pullulement des cliniques clandestines à travers le pays est vraiment admissible. Mais que le président de la République, lui déteint la force publique se mette à dénoncer cette situation qu’il a vu grandir et prospérer sous son régime relève d’une légèreté et d’un amateurisme ambiants. Pourtant, c’est ce que fait Alpha Condé.

En effet, au cours d’une de ses dernières sorties, il déclare presque en transe : «Est-ce qu’il n’est pas nécessaire de créer une brigade du secteur de la médecine afin de contrôler toutes les cliniques clandestines, qui sont des mouroirs? » Il était là encore lorsque des jeunes femmes sont mortes dans des cliniques insalubres de Conakry. Il était là lorsque ses ministres successifs prenaient des engagements pour endiguer la propension. Il était enfin là, lorsque Tiégboro a voulu partir contre ces cliniques ou prises comme telles. Ce dernier est à l’origine de la fermeture de plusieurs cliniques clandestines où des chirurgiens formés dans des conditions douteuses pratiquaient des opérations parfois fatales pour les patients. Il y en aurait plus de cent cinquante à travers la ville. Les principaux établissements publics (CHU de Donka, hôpital Ignace-Deen) sont sous-équipés. Alpha Condé le sait pertinemment que l’accès aux soins est l’un des défis les plus importants pour son régime, lequel, il y a des ansprévoyait d’injecter 44,1 milliards de francs guinéens (4,5 millions d’euros) en 2011 dans le secteur de la santé. Mais, dans les faits, la Santé aura été reléguée au second plan.

Dénoncer les cliniques clandestines est mieux, mais, combattre les contrevenants c’est encore plus salutaire. En juin 2015, le président de l’Ordre national des médecins de Guinée, le Pr Ibrahima Baldé, avait préconisé, la fermeture systématique des cliniques privées parce qu’elles ne sont pas aux normes : «Il faut fermer systématiquement les cliniques qui n’ont pas d’agrément et subventionner les cliniques normales qui ont prouvé leur utilité dans ce pays. Si chacun fait ce qu’il veut, si n’importe qui ouvre un cabinet là où il veut, sans se mettre en rapport avec l’Ordre des médecins, sans avoir l’agrément du ministère de la Santé, cela vous donne une idée de l’état dans lequel se trouve le secteur de la santé en Guinée. (…) La catastrophe est incontournable. »

Oui, ce bien des mouroirs ! Mais Alpha Condé doit aller au-delà de la dénonciation. C’est une question de salubrité publique. Mais, visiblement il n’en a cure. Pour un simple bouton, il est en jet privé, direction Rabat, Paris, New York, Londres. La majorité silencieuse qu’il dit défendre est dans la gueule des grands charcutiers des cliniques hors-normes.

 

 

Jeanne Fofana, www.kababachir.com